Complexité vient du latin complexus, qui signifie "tissé ensemble", au sujet d'éléments différents imbriqués.
La pensée complexe aspire donc à la connaissance multidimensionnelle, essaie de tendre vers une vision globale des situations, tout en sachant l'impossibilité de l'omniscience. L'approche systémique est une façon de penser de manière complexe et donc, tant que faire se peut, d'éviter la pensée simple, qui pourrait être réductrice et limiter, in fine, le champ d'action.
En réponse à ce postulat de la complexité, développé notamment par Edgar Morin, a été conceptualisé ce que Jacques Ardoino a nommé l'approche multiréférentielle. :
" L'analyse multiréférentielle des situations, des pratiques, des phénomènes et des faits de nature institutionnelle, notamment dans le champ éducatif, se propose explicitement une lecture plurielle, sous différents angles, et en fonction de systèmes de références distincts (...) de tels objets. "
Ainsi, il s'agit tant de pouvoir observer les situations, par définition complexes, en confrontant des points de vue ou ressentis différents, même s'ils peuvent sembler contradictoires voire antinomiques, que de pouvoir regarder les situations sous différents aspects théoriques, qui vont venir étayer les pratiques professionnelles de l'accompagnement, soutenir l'élaboration de plans d'action.
La personne accompagnée est donc considérée comme une personne ayant des pensées, des émotions, des comportements, des besoins, des souhaits, des droits, des compétences, des potentialités et sa façon d'apprendre (TCC, Théorie de l'autodétermination, sciences de l'éducation). Elle est pensée avec son histoire et ses représentations (psychologie, trauma), comme appartenant à différents groupes, une famille, des amis, des collègues, une culture (attachement, psychologie sociale, approche systémique, psychologie interculturelle), qui évolue sur un territoire, en interaction avec des organisations et des institutions (sociologie, psychosociologie).
Cette démarche devient donc un point de départ éthique de l'accompagnement, un garde-fou, en ce sens qu'on ne détient aucune vérité ni conceptuelle ni sur le personne accompagnée, pas plus en tout cas que la personne elle-même, que sa famille ou tout autre environnement qu'elle côtoie, et que c'est l'entrecroisement de ces points de vue qui permet de s'approcher d'une certaine réalité. Cette démarche permet donc de soutenir la métacognition et les dynamiques d'équipe et partenariales.
Par ailleurs, l'approche systémique est aussi d'une grande aide lorsque l'on se retrouve en difficulté. Elle permet de tendre à observer l'ensemble, c'est-à-dire l'autre, et les différents systèmes dans lesquels il est inclus, mais aussi nous-même, ainsi que l'interaction, la relation qui nous lie. Il s'agit ainsi d'analyser la résonance. Le problème n'est donc pas l'autre, il est un élément du problème qui se pose tout autant que moi, et si nous faisons partie du problème, nous faisons partie de la solution !
Même si tout cela peut paraître très théorique et peu palpable, cela a, en réalité, une grande incidence dans les faits : dans les postures, la façon de créer l'alliance, de faire émerger et formaliser des objectifs d'accompagnement et les actions et moyens mis en oeuvre, leur évaluation, la cohésion d'équipe, le management...
Toutes mes interventions, en analyse de pratiques, en formation, lors d'évènements institutionnels ou de gestion de crise, s'appuient sur cette vision, et permettent de travailler sur les risques psycho-sociaux, de concourir à la bien traitance et soutenir les approches recommandées en santé mentale et dans le champ du handicap, en mobilisant l'intelligence collective du groupe accompagné.